embrassades suspendues

Les embrassades suspendues en attendant la levée des barrières

Mémoires de vives embrassades (lecture 3 mn)

POUR SE SOUVENIR – POUR IMAGINER

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Il y a des gens qu’on aime et de qui il a fallu s’éloigner par les gestes barrières, par les successifs temps de confinement. Il y a ceux qu’on ne peut plus prendre et serrer dans nos bras (le sens premier du mot embrasser) alors que notre manière de leur dire je t’aime passait par cet « irremplaçable » sens du toucher dans l’étreinte physique.

Je me demande ce que vont devenir les moments de tendresse si réconfortants de contact physique qui font appel à plusieurs de nos sens et qui en disent bien souvent plus qu’un long discours ou qu’un échange de messages.

Lorsqu’ils manquent ces moments, c’est peut-être le bon moment pour se rendre compte de ce qu’il nous manque vraiment dans ce manque.

Et que va-t-on faire lorsqu’il sera à nouveau possible de s’embrasser ? Osera-t-on aller embrasser ceux et celles pour qui on a eu tant de douces pensées pendant l’éloignement ? En y songeant, on peut se demander si on sera toujours sur la même longueur d’onde avec ces personnes qui nous sont chères, si une amitié sera préservée, et pas usée par l’éloignement, et tant d’autres choses … en y songeant.

Si l’on ne peut encore répondre à ces questions, on peut toutefois répondre maintenant à ce qu’il se passe pour nous quand on repense à nos fortes étreintes passées et dont le souvenir précieux est encore vif aujourd’hui.

Lorsqu’on prend le temps de faire cela, on s’aperçoit parfois que de multiples détails peuvent surgir de nos mémoires d’embrassades.

 Il y a par exemple des images autour de nos embrassades passées : Un regard pétillant, le souvenir de légers cheveux gris qui volaient au vent, un pull bleu… avec des flocons, un sourire …sincère.

Et ces parfums L’odeur familière d’un potage qui mijotait dans la cuisine pendant qu’on se retrouvait enlacés tendrement. Un parfum, porté, qui faisait penser à un parfum de star.

Ou ces sons : Des murmures à l’oreille qui berçaient tranquillement pendant une étreinte celui qui les écoutait. Les annonces sonores de la gare lors de retrouvailles passionnées « éloignez-vous de la bordure du quai, s’il vous plait ».

Et puis il y a ce formidable sens du toucher caractéristique entre deux personnes, celui qui donne le ton :  

Avec ceux qui font mal parce qu’ils serrent trop fort, ceux qu’on n’ose pas serrer fort de peur qu’ils ne se cassent, ceux qui serrent longtemps… très longtemps, ceux qui serrent souvent, ceux qu’on aimerait encore serrer dans nos bras et qui ne sont plus là.  Ceux qui n’embrassent pas parce que ce n’est pas dans leur culture. Et ceux qui feignent l’étouffement pendant une embrassade parce qu’ils sont mal à l’aise ou je ne sais quoi d’autre. Ceux qui disent STOP avant qu’on ne s’approche trop et qui nous rappellent qu’une embrassade doit être consentie.

Et enfin ceux contre qui il est tellement bon de se blottir qu’on a l’impression que le temps s’est arrêté.

Oui, que c’est bon de se rappeler de toutes ces fois où les embrassades étaient l’évidence et que

l’envie d’ouvrir nos bras à quelqu’un

et le plaisir de se voir accueilli les bras ouverts allaient de pair.

S’imaginer les possibles lorsque rien n’entravera l’élan naturel et qu’il n’y aura plus aucune barrière

*Article écrit par Sylvie Calmels le 7 décembre 2020